Caffénol…what else? Nothing |
Ces dernières décennies, en photographie argentique, un produit chimique était et restera indispensable et unique à la révélation d’une image latente, et ce, malgré une toxicité avérée : l’hydroquinone. Les révélateurs comportent tous (couleurs et N/B) un réducteur (Génol-Hydroquinone et/ou Phénidone qui transformera l’image latente en argent métallique).
Des techniques alternatives récentes ont été inventées pour pallier la toxicité environnementale de cette chimie. En 1995 un groupe d’étudiants et leur professeur ont décidé de fabriquer leur propre révélateur à base de produits du quotidien : le Caffenol C était né !
Non seulement le Caffenol est écologique, mais il est efficace. Les ingrédients principaux se trouvent dans une cuisine :
- du café soluble (le moins cher possible, donc le plus acide),
- du carbonate de soude (au rayon droguerie, à défaut des cristaux de soude),
- de l’acide ascorbique (à défaut de la vitamine-c),
- du bromure de potassium (facultatif, à défaut du sel iodé).
L’acide caféique va agir comme révélateur tandis que le carbonate de soude va agir sur l’acidité de la solution (le Ph), l’acide ascorbique sert de catalyseur et le sel va réduire le voile qui pourrait apparaitre sur le film surtout en « stand-développement ». Le café doit être instantané et de préférence de mauvaise qualité (1er prix). Les dosages de carbonate de soude sont exprimés pour un produit dit « anhydre » (ne contenant pas d’eau), et à la place du sel il vaut mieux du bromure de potassium (KBr) qui permet une meilleur fiabilité dans la disparition du voile. La solution devra être préparée juste avant l’utilisation car le principe actif ne dure pas longtemps, car au bout d’une heure la solution aura perdu la majorité de son pouvoir d’action.
Des techniques comme : le Caffénol, le Wineol, ainsi que d’autres techniques non-polluantes sont efficaces aussi bien sur le développement des films noir et blanc que des films couleurs mais aussi sur du papier photo, et même du film cinéma!
Fabriquer le révélateur au café « maison » est très simple : diluer dans de l’eau de préférence distillée du café soluble, de l’acide ascorbique et des cristaux de soude (washing soda ou carbonate de potassium), et éventuellement du sel iodé (ou Kbr) pour éviter le voile. La simplicité de fabrication de ce révélateur et la qualité des images produites vous étonnera! La qualité de ce révélateur, surtout en « stand » est son pouvoir compensateur : en effet, en laissant plus d’une heure le film se révéler et alors que les hautes lumières (donc les grains noircis) sont développés les premières minutes, les composants chimiques n’agissant plus sur ces zones, ils s’attaquent les dizaines de minutes restantes aux zones moins exposées ou plus sombres (les zones claires et bouchées), d’où cet effet compensateur. Le négatif est contrasté, avec de jolies tonalités de gris, les ombres ne sont pas bouchées.
Voici la recette universelle et originelle et qui a servi de base à bon nombre de variantes :
Après divers essais plus ou moins fructueux et avec divers films (périmés ou pas) et en testant les 3 méthodes (C-M, C-H, C-L) je vous propose ici une recette de caffénol qui marche du tonnerre et qui pour moi est un concentré des meilleures techniques et surtout qui me donne satisfaction.
J’ai pu la trouver sur ce site.
Procédure pour 1 film 24×36 noir et blanc (pour un film 120 entre parenthèses)
Au préalable pré-tremper le film dans la cuve Paterson dans 400ml (500ml) d’eau à température ambiante pendant 5 mn,
Pour 350 ml (500ml) d’eau (quantité nécessaire pour développer un film en spire Paterson :
L’ingrédient du pH : 5.6 (8) grammes de « washing soda » (carbonate de sodium)
Le pH élevé peut poser un problème sur les pellicules sensibles (400 ISO et plus) ou si vous faites du stand-dev. La soude est l’ingrédient qui va permettre de donner au révélateur le bon pH. Pour bien agir et être efficace sur la pellicule, le révélateur doit être aux alentours d’un pH 10 (9-11).
L’antivoile : 0.35 (0.5) grammes de Bromure de Potassium (peut être remplacé par du sel de table iodé) : il remplit très bien sa fonction d’éliminateur de voile.
Le révélateur : 14 (20) grammes de café lyophilisé 1er prix (moins il est cher mieux c’est, éviter les cafés haut de gamme). Le café soluble est la source de l’acide caféique, l’autre élément révélateur de la recette.Il se retrouve dans beaucoup de plantes comme le thé, le Yerba maté, la sauge, le malt, la feuille de coca, le raisin…Cela ouvre donc la porte à tout plein de recettes comme le Beerenol, le Vinol, le Teanol ou encore le Matenol qui ne sont en fait que des dérivés du Caffenol!
L’émulateur : 3.5 (5) grammes d’acide ascorbique (Attention : pas de vitamine C car il y a beaucoup d’adjuvants et colorants qui entravent la qualité finale du développement). Un des deux révélateurs de la recette! L’acide ascorbique est un activateur de l’acide caféique. Mélanger les deux dans une recette est une très bonne idée!
Merci au site https://argentiquedeuxpointzero.com/
Mixer le tout dans cet ordre, et s’assurer que tous les grains soient dissous.
Temps de développement : 70 min à 18°
Pour ma part, je rajoute 10 à 15mn au 70mn préconisées, l’image est bien mieux contrastée. Ceci est à appliquer impérativement aux films périmés pour compenser la perte d’au moins 1 diaphragme dû à l’âge du film.
Agitation : Première minute : 3 à 4 retournements sans brusquer, puis répéter à la 2e, 4e, 8e minute.
Ensuite, laisser reposer la cuve jusqu’à la fin.
Au bout des 70 ou 80mn au choix, on rince à l’eau pour éliminer toute trace de café, puis on fixe au fixateur (hyposulfite de soude) quelques minutes. Rinçage pendant 10 à 15 mn à l’eau claire, puis ajout d’un agent mouillant dans le bain final, et séchage.
Voici les résultats sur de la pellicule FP4 (125 iso) périmée depuis 20 ans et exposée à 80 iso (compensation de 2/3 de diaph dû à la péremption). Les prises de vues ont été faites ici avec un Nikon F801 équipé du Sigma 50mm f/2.8.
Le résultat est pas mal du tout : la teinte sépia est naturelle et est due au café. Cette teinte varie en fonction de la pellicule et de son épaisseur : ici il s’agit d’une FP4. J’ai testé le caffénol sur d’autres pellicules (Fomapan, Tmax, Tri-X) et les résultats diffèrent. Peu importe, de toutes façons cette jolie teinte vire au bleu lors du passage au positif.
C’est peut-être un peu « surdéveloppé » (à cause du temps supplémentaire et par le fait qu’au lieu des 20°C j’étais à 23°C). Pour les prochaines tentatives je développerai 70mn à 20° mais je continuerai à surexposer la pellicule de 2/3 à 1 diaph.
Le grain est joli, pas trop prononcé en général (sauf ici à cause du voile dû à la péremption). De toutes façons le grain « argentique » n’est pas laid en soi, et INCOMPARABLE avec le bruit numérique.
La série ci-dessous a été faite en mode « surimpression » sur le Nikon F801. Ce mode permet d’empiler jusqu’à 9 photos en superposition (« superimpose » en anglais), ce qui autorise une création abstraite de ses compositions. Aucun autre boitier (argentique ou numérique) ne propose à ma connaissance cette fonction évoluée (à part ceux qui empilent 2 ou 3 vues). Je ne parlerai pas de Photoshop ici où il est bien sûr possible d’empiler autant d’images qu’on veut, mais vous voulez vraiment savoir ce que je pense de ce logiciel pour trafiquer les photos??….
Avec cette technique, le champ créatif ainsi proposé est immense et ouvre des horizons seulement limités par votre imagination et votre mémoire (toujours se rappeler des précédentes prises de vues pour la composition ou bien en faire des croquis). Ici j’ai empilé 3 vues à chaque fois.
Ci-dessous une autre série : quelques portraits, avec le même type de pellicule. On voit bien, malgré la faiblesse des détails dû au scan et au voile dû à la péremption (20 ans quand même) qu’il y a une bonne dynamique et de jolis tons de gris.
Disclaimer : mes prises de vues, mes conseils et mes expérimentations n’engagent que moi. Ces articles me sont d’abord à titre personnel, d’une grande utilité. Je suis assez scrupuleux sur mes écrits. Je vérifie et cite quand il se doit mes sources…malgré tout il peut subsister quelques erreurs notamment sur la science de l’optique et de la couleur, car rien n’est gravé dans le marbre sauf la physique! Pour conclure, je partage juste mon expérience personnelle, mes impressions et mes expérimentations. Si elles peuvent servir aux lecteurs, j’en serai heureux! J’espère en faire profiter un plus grand nombre en les partageant. |
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