Va dans l’rétro, ça tanasse |
Je vous présente ici une partie de mon travail « perso » d’avant, c’est à dire de mes débuts dans les années 70 aux années 80-90.
Après la période PIF en 1972 et son gadget « Appareil photo » (qui fonctionnait vraiment) et qui m’a fait découvrir la photo, ma passion a vraiment commencé avec l’acquisition d’un Zenit EM (le fameux reflex soviétique) à l’âge de 14-15 ans. Avec cette série en couleurs, prises entre 1976 et 1984 environ, j’étais obnubilé par les couleurs et le graphisme, ça m’a pris très jeune! Il m’arrivait de partir le matin et de marcher des kilomètres dans Montpellier pour faire « la photo ». J’étais vraiment en recherche d’expressivité à travers les couleurs, je voulais exprimer ma vision. La Kodachrome chargée dans l’appareil, j’étais alors en quête de couleurs saturées, de contrastes forts ou d’harmonies. L’appareil photo était pour moi une protection et en même temps le « moyen » qui me permettait de libérer ma créativité. L’appareil photo intercalé entre le monde et moi, c’était un rempart, j’osais défier le monde…
Le Zenit était vraiment l’appareil pour apprendre les rudiments : la cellule au sélénium externe (avec rappel dans le viseur par une aiguille à ajuster) ne pardonnait aucune erreur d’exposition avec la Kodachrome. Une valeur de diaphragme/vitesse d’écart et c’était la catastrophe, surtout en sous exposition. Beaucoup de ratés donc puisque la cellule ne calculait pas la lumière incidente sur le sujet mais la lumière réfléchie! Si votre sujet était loin, c’était donc faussé. Bref, l’exercice « lecture des valeurs, ajustement de la vitesse et du diaphragme » était vraiment fastidieux mais pédagogique et je le conseille vraiment à qui veut apprendre les bases.
A cette époque je n’utilisais pratiquement que la Kodachrome 32 ou 64, pellicule diapositive suprême, mère adorée des coloristes et dont pour moi le maître incontesté est Franco Fontana. La magie était au rendez-vous : rendez-vous compte, il fallait attendre entre 2 et 3 semaines pour avoir ses diapositives, il fallait être patient!. L’usine de développement était à Marseille (que j’ai visité en 1981). Saviez-vous que cette pellicule diapo avait un rendu unique, en cela qu’elle était noir et blanc?. C’est ce qu’on appelle une pellicule a développement chromogène : les colorants ne sont pas dans la pellicule (qui est noir et blanc) mais viennent se fixer sur les tons de gris dans les bains au développement.
C’est la pellicule préférée des reporters car d’une part les couleurs sont saturées et réalistes, et d’autre part, le procédé Kodachrome permet à la diapo de se conserver plus d’un siècle, un bonheur pour les maisons d’édition. (contrairement à l’Ektachrome qui elle, ne permet qu’une conservation de 15 à 20 années tout au plus).
Comme la Kodachrome était chère, il fallait y aller mollo avec le déclencheur, d’où la rareté de mes photos (réussies) de l’époque.
Puis dans les années 1986 je me suis mis au noir et blanc. J’ai ainsi fait pas mal d’études graphiques. J’adorais me balader dans Paris, et faire la chasse à l’instant magique, à la concordance d’éléments qui font « la photo », mes regards se portaient sur tout, tout était prétexte à une photo pour peu que l’on choisisse le bon angle, la bonne lumière. Lors de ces balades je pensais évidemment en noir et blanc, hors de question de focaliser mon attention sur les saturations et les harmonies de couleurs. Mes appareils chargés en Agfapan, FP4, Tmax ou même de Technical Pan 2415, j’étais plutôt en quête de contrastes et de perspectives, de clairs et d’obscurs, de géométrie et d’humanité. La plupart sont faites au Zenit, au Ricoh Xr-1 et au Pentax Spotmatic. Les négatifs ont été scannés à l’Epson Photo 4490 en 1200 dpi.
Ces dernières années, j’ai découvert un photographe malicieux et inventif, René Maltête, qui est devenu pour moi LE maître incontesté de la photographie de rue. Ses images sont désopilantes et très recherchées et j’aime énormément son travail.
Je me rends compte à postériori que j’ai souvent recherché dans ces photos ce que Maltête, Pau Buscato et Harry Gruyaert, Saul Leiter, Ernst Haas, Jesse Marlow, ou Elliot Erwitt ont parfaitement réussi à exprimer et qui sont encore aujourd’hui des idées majeures de ma démarche photographique.
Étiquettes : kodachrome, noir et blanc, perso, zenit
Un goût de l’insolite… une abstraction naturelle arrachée à la réalité du monde… Voyages dans l’image, c’est beau !
Merci. Oui, il faut en cela redevenir candide et s’étonner de tout, lever ou baisser la tête plutôt que chercher l’angle horizontal, et puis il faut faire confiance à la magie des instants. La photo de rue est bien plus qu’une manière de photographier, c’est presque une obsession!
J’adore également le travail de Pau Buscato :
https://www.instagram.com/paubuscato/
La série des années 70 est prometteuse (avec notamment un étendage immanquable… encore faillait-il être là, et saisir la bonne lumière au bon moment), mais je me sens plus proche de la 2nde planche, alliant le N&B et la photo de rue. Ce sont des ingrédients qui me fascinent. Ce n’est pas un secret pour les photographes, évidemment, le N&B dévoile une forme de réalité dissimulée, comme une histoire que le vernis de la couleur occulte le plus souvent (le rouge du tricot, dans la 1ère série, est le contre-exemple idéal, on en convient aisément… et c’est bien là que le regard du photographe est important). Hors objectif de l’appareil photo, l’oeil ne « voit » pas ces nuances de gris, et pourtant lorsqu’elles sont révélées, elles accordent à l’image une portée toute particulière. Un bel exemple (et je parle aussi de la série) illustrant le pouvoir de la technique et de la vision artistique, en mesure de transcender la réalité « première ».
Comme cela est bien dit, et comme cette vision correspond à la mienne!