Clara dans l’ether |
Le cérémonial d’une séance au collodion, ce long processus de temps de pose de plus de 6 secondes (ou plus), permet de déstabiliser l’ego. Ces secondes sans bouger deviennent une éternité, le doute s’installe, l’assurance en soi faiblit. La concentration nécessaire à tenir une pose longue fissure la velléité d’utiliser une posture d’apparat. C’est alors que la magie opère : devant l’objectif, la personne photographiée, dont les mouvements sont prohibés livre une partie de sa nature cachée, de ses faiblesses et de sa part d’ombre.
Clara a 14 ans. Devant mon objectif, elle se trouve souvent comme figée dans l’ether, ce lieu matériel hypothétique remplissant tout l’espace mais impalpable et dans lequel les ondes lumineuses sont censées se propager…et où son âme aime divaguer. Elle aime penser et réfléchir, et réfléchit ces ondes lumineuses, captées par les sels d’argent liés à l’ether du collodion.
(NB : Une des composantes du collodion est l’ether)
Clara est souvent là, sans être là, et préfère échapper au tumulte du monde en serrant bien fort son panda dans ses bras.
Plaques 13×18 réalisés en 2020 – poses de 6 sec, objectif en laiton de lanterne magique.
Le procédé tel que tu le décris, à travers la contrainte de la pose longue, remet effectivement en question le rapport que le sujet entretient habituellement avec la photo instantanée.
Et c’est vrai que c’est révélateur, comme je peux en témoigner : lorsque tu as fait mon portrait au collodion en « binôme » (avec ma MT-07 ;-)), si je n’ai pas eu l’impression d’être mis sur la sellette par l’appareil photo, je n’ai pas davantage eu celle de forcer le trait. Et pourtant, quelle surprise de découvrir une expressivité aussi sévère…
La part d’ombre, disais-tu…