Le collodion humide c’est faire une pause et prendre le temps de créer une image |
Clara est l’aînée de mes 2 dernières filles. Du haut de ses 9 ans, elle avait toujours été plus ou moins réticente malgré quelques tentatives, à poser pour le collodion humide contrairement à Roxane qui affichait un enthousiasme de tous les instants pour ces séances. Aujourd’hui j’ai senti Clara prête à affronter l’objectif avec un tel entrain que j’en fût étonné! Elle a même suggéré les poses!
Cette séance a été réalisée avec la chambre 13×18 DIY dont la fabrication est expliquée dans le précédent article. L’objectif est le 457mm f/3.6 et la séance a été faite en studio avec une boîte à lumière en éclairage principal, une gamelle de 350w qui éclaire le fond blanc, et une autre qui éclaire les cheveux et les épaules à l’arrière.
Pour cette séance je voulais tester la formule collodion au sels de potassium de Disactis.com, que j’ai fabriquée hier. En effet, j’ai trouvé un fournisseur en France (je mettrai les liens en bas) pour du collodion officinal, et un autre fournisseur pour le potassium bromide, et le potassium iodide. Cela m’évite de payer une fortune en port, pour les kits prémixés achetés sur Disactis ou Mamut-Photo. Le choix du potassium plutôt qu’au cadmium le plus souvent utilisé tient au fait que le cadmium est difficile à trouver, dangereux et pas du tout écologique. De plus cette formule n’utilise pas d’ether (en plus de celui contenu dans le collodion), mais à la place on utilise de l’éthanol à 95% dénaturé. Le résultat est aussi bon qu’avec les formules au cadmium et à l’ether (difficile à trouver).
Les résultats me plaisent beaucoup, mais j’ai eu des petits imprévus, notamment au niveau de mon collodion : je ne l’ai pas assez laissé « mûrir » car j’ai voulu l’utiliser tout de suite. Lorsqu’il est frais, il est sirupeux et si on ne laisse pas assez sécher avant de tremper la plaque dans le bain d’argent (45 sec environ), il y a des coulures et même des lignes que je n’avais jamais eues auparavant. Je vais donc le laisser reposer quelques jours, il n’en sera que meilleur. De plus, je pense ne pas avoir assez mélangé le bain de nitrate d’argent après l’avoir mis à niveau avec de l’eau déminéralisée. Pour finir, j’ai eu beaucoup de poussières au scan, que j’ai tenté d’éradiquer au maximum avec le tampon dans Photoshop, c’est quand même plus présentable, puis j’ai ajusté les niveaux pour avoir un bon contraste, et c’est tout.
Pour la durée de développement avec le révélateur DIY au sulfate de fer et au sucre, elle a été en moyenne de 30 sec, au delà, les gris montent plus au détriment du contraste et un risque de voile peut apparaitre. La durée du fixage a été de quelques minutes et le lavage sous un robinet environ 5 mn.
Les plaques aluminium noir ont été commandées sur Mamut-photo au prix de 0.82cts pièce, leur aspect est satiné et rugueux, je leur préfère celle de WetplateSupplies.com qui ont un aspect brillant « high glossy » bien plus beau que le satiné. De plus le collodion adhère bien plus sur le glossy. Je vais essayer les verres noirs de Mamut-Photo, je pourrai ainsi comparer entre les plaques alu, le verre, les plaques PMMA et le verre noir.
Les ferrotypes (tintype) ont ceci de particulier qu’en fonction de la source et l’angle de l’éclairage, l’impression de contraste et de la luminosité peuvent changer. Un ferrotype se regarde en plein jour avec une bonne lumière. Le portrait de droite est très foncé, c’est le premier de la série et je n’ai mis que 2 sec, les suivants sont à 4/5 sec, en effet, il faut le double d’exposition car le tirage de la chambre était important. D’ailleurs j’en profite pour donner le lien vers un outil indispensable à tous les amateurs de chambres photographiques : un calculateur très simple de correction d’exposition pour le tirage du soufflet.
Les défauts du collodion (présence de poussières sur la plaque vierge, manière de couler le collodion, de plonger dans le bain d’argent, précision du geste au développement) sont plus ou moins visibles sur toutes les plaques mais font vraiment partie du charme de cette technique : les coulures, trainées, stries, traces, et poussières donnent de la vie à ces tirages. On est loin des images « clean » et parfaites en numérique! Le charme de ces photos réside également dans l’artisanat et le savoir-faire mis en œuvre, qui, je pense est palpable dans les émotions que procurent ces images. Tenir un ferrotype dans ses mains, le faire bouger à la lumière pour en admirer les différences de tonalités et de relief, le manipuler avec précaution en sachant que l’épreuve est unique, tout ceci est magique. Une autre facette de ce procédé qui apporte son lot d’étonnement : nous avons l’habitude de nous voir dans un miroir. C’est un visage auquel nous sommes habitués. Il arrive que sur des photos nous ayons du mal à nous reconnaitre c’est pourtant ainsi que nous voient les autres. Pour le collodion, il en va autrement : l’image est inversée, nous regardons donc notre portrait au collodion comme si nous étions devant un miroir, c’est aussi cet aspect qui donne du charme et de l’originalité à ce procédé !
Update du 18 août 2019 : prise de vues effectuée par temps gris pour tester mon développeur « frais » DIY, avec Clara à la pose. (la tête a bougé pendant les 2 secondes de pose, donnant un visage inhabituel).
- Chambre DIY avec le 457mm f/3.6
- 2 secondes de pose
- Collodion « frais » d’il y a 2 jours réalisé avec la formule ci-dessous
- Révélateur « frais » d’hier, selon cette formule : 0,5L de vinaigre blanc, 8gr de Sulfate de fer, 5gr de sucre blanc, 7ml d’alcool 95% dénaturé
J’ai encore des coulures que je n’arrive pas à comprendre bien que j’ai méticuleusement trempé la plaque dans le nitrate d’argent et que j’ai développé dans les règles de l’art…mais c’est ça aussi la magie : l’aléatoire qui surgit de temps à autre, sans explication, ou alors je dois mal faire une étape mais franchement je ne sais pas….
Pour mon collodion fait maison j’ai utilisé la formule que l’on trouve sur Disactis à cette adresse.
Pour 200ml de Collodion prêt à l’emploi :
- 100ml de Collodion concentré à 4%
- 100ml d’Ethanol à 95°
- 1gr d’Iodure de potassium
- 0,4gr de Bromure de Potassium
- 2,2gr d’eau déminéralisée.
Sites :
- Collodion officinal : Pharmaservices.fr (livraison en 2-3 jours)
- Potassium bromide : Etsy.com (livraison en 3-4 jours)
- Potassium iodide : Ebay.co.uk
- Le bio-éthanol s’achète en grande surface ainsi que l’eau déminéralisée.
Disclaimer : mes prises de vues, mes conseils et mes expérimentations n’engagent que moi. Ces articles me sont d’abord à titre personnel, d’une grande utilité. Je suis assez scrupuleux sur mes écrits. Je vérifie et cite quand il se doit mes sources…malgré tout il peut subsister quelques erreurs notamment sur la science de l’optique et de la couleur, car rien n’est gravé dans le marbre sauf la physique! Pour conclure, je partage juste mon expérience personnelle, mes impressions et mes expérimentations. Si elles peuvent servir aux lecteurs, j’en serai heureux! J’espère en faire profiter un plus grand nombre en les partageant. |
Technique ancienne remise au gout du jour, Merci pour ces belles photos et explications !