Une mouche dans le plus simple appareil..photo |
Bienvenue dans le monde de l’extrême macrophotographie! J’ai souvent voulu photographier au delà du rapport 1:1, c’est à dire avoir l’objet photographié plus gros qu’il n’est en réalité. J’ai essayé, depuis une vingtaine d’années plusieurs combinaisons d’objectifs+boitiers sans jamais bien arriver à un rendu correct (piqué, profondeur de champ, relief et grossissement, absence d’aberrations chromatiques). Par manque de moyens financiers limités d’abord (un objectif qui atteint les rapports 2:1, 3:1 ça ne court pas les rues comme le Canon MPE-65 à 1000 euros), et aussi pour rester fidèle à ma philosophie qui consiste à expérimenter, tester avec les moyens du bord, fabriquer ou bricoler afin d’avoir toujours un résultat satisfaisant ET de qualité.
Le but de mes expérimentations, vous l’aurez compris, consiste en la démonstration qu’il n’est nul besoin d’acheter du matériel dédié, et cher, pour avoir un vrai résultat : un trépied, un bon APN APS-C, un objectif à quelques dizaines d’euros, 2 gamelles d’éclairage continu en 100w, et un peu de bricolage suffisent, la preuve!
Il existe plusieurs techniques de macrophoto (liste non exhaustive) :
- les bagues allonges : on intercale des bagues entre l’objectif et le boitier, il n’y a pas de groupe optique
- le soufflet : même usage que les bagues allonges mais ici on a un contrôle du tirage grâce à un soufflet sur rail
- les bonnettes : ce sont des lentilles convexes qui se vissent à l’avant d’un objectif pour obtenir un grossissement en proxiphoto
- l’objectif macro : les focales vont de 50mm à 180mm
- l’objectif de microscope : monté sur un soufflet il permet d’extrêmes rapports de grandissement
- l’objectif inversé : c’est la technique que j’ai utilisé ici. Elle consiste à utiliser un objectif 24×36 ou C-mount et de préférence grand angle (28 ou 35mm dans l’idéal) et de le visser sur un boitier, mais à l’envers. La formule optique étant inversée, elle devient qualitativement parfaite pour la macrophoto.
L’objectif utilisé ici est un Fujinon TV 35mm f1.7. C’est un objectif C-mount monté généralement sur des caméras de surveillance, mais qui, utilisé en photographie est une merveille. La bague d’adaptation est fabriquée (bricolée) par mes soins et le tout est monté sur un adaptateur pour Fuji-X.
A noter que cet objectif donne un 50mm f1.7 sur le X-E2 (avec un fort vignetage) et un 70mm sur le GH1 (sans vignetage) et je peux vous dire que la qualité est au rendez-vous.
Je choisis généralement le Fuji X-E2 pour la macro car, outre le fait qu’on puisse travailler jusqu’à 1600 Iso sans voir l’apparition de bruit numérique, son capteur extraordinaire « X-Trans », sans filtre passe-bas, permet d’obtenir la quintessence des détails. En effet, ce capteur 16Mpixels n’a pas de filtre anti-crénelage (voir cet excellent article). Le revers de la médaille à cette technologie : le risque d’apparition de moirés dûs aux interférences…
Les insectes photographiés sont une magnifique « Cétoine dorée » et une non moins belle « Lucilia Sericata« . Leur carapaces sont vertes mais les reflets sur leur corps métallisée sont irisés, et sous les spots, le corps entier change de couleur : le vert vire au doré puis devient rouge ou jaune selon l’orientation de la lumière. Sur les photos, on découvre une Cétoine à l’exosquelette impressionnant de beauté, mise au service de l’efficacité et une mouche aux détails insoupçonnables de cruauté. Bien sûr il est impossible d’imaginer une telle foison de détails car invisibles à l’œil nu, les insectes ne faisant qu’1cm de longueur. On peut être dégoûté devant cette nature monstrueuse, ou pas.. car derrière ces images de monstres il y a quelque chose qui nous interpelle : cet agencement parfait des membres, articulations, carapace, tout ceci au service de la vie , du combat pour la vie et la survie, est accessible à celui qui veut bien plonger dans ce monde microscopique, autant que nous le ferions lorsque nous pointons un télescope vers le cosmos. Mais dans « microcosme », cosmos ne signifie-t’-il pas « ordre, beauté »?
Les prises de vues ont été faites à f/16-f/22. La diffraction apparait à f/22, c’est normal, c’est une résultante physique de la petitesse du trou formé par le diaphragme.
Disclaimer : mes prises de vues, mes conseils et mes expérimentations n’engagent que moi. Ces articles me sont d’abord à titre personnel, d’une grande utilité. Je suis assez scrupuleux sur mes écrits. Je vérifie et cite quand il se doit mes sources…malgré tout il peut subsister quelques erreurs notamment sur la science de l’optique et de la couleur, car rien n’est gravé dans le marbre sauf la physique! Pour conclure, je partage juste mon expérience personnelle, mes impressions et mes expérimentations. Si elles peuvent servir aux lecteurs, j’en serai heureux! J’espère en faire profiter un plus grand nombre en les partageant. |
Quelle beauté cet insecte!! insoupçonnée! La macro est vraiment un monde magique où ce qui est invisible apparaît.
Merci pour tes expériences qui montrent qu’on peut faire sans avoir « LE » matériel… Mais je persiste, ce n’est pas l’appareil qui est important, mais bien la personne qui est derrière.
Si tu me donnes un « sténopé » j’aurai du mal à faire le même genre d’images!
C’est tout à fait remarquable: la technique, et l’insecte. Ce dernier révélant ses incroyables subtilités, grâce à la technique… au bricolage… et aux astuces. Les fabricants « oublient » volontiers de produire ces optiques réversibles, qui seraient munies d’un système de vissage aux 2 extrémités 😉 Ils préfèrent vendre de « vraies » optiques macro, à prix d’or.
Il y a déjà un moment que j’ai envie de me mettre à la macro. Mais par manque de temps… et manque de moyens, surtout, à consacrer aux optiques macro. L’inversion est réellement LA bonne idée. Reste à développer les compétences d’adaptations des bons cailloux aux bons boîtiers 🙂
Merci. Comme je le dis dans l’article, il faut essayer de faire avec les moyens du bord, expérimenter, essayer ceci avec cela, ne pas hésiter à essayer même des choses improbables…Achète une bague d’inversion et visse sur ton Sony Alpha, ton objectif Zuiko 50mm à l’envers, place 2 spots basiques de part et d’autre de ton sujet et c’est parti! La seule chose effectivement qui peut mettre un frein à ton élan est le manque de temps… mais c’est juste une question d’envie et de volonté ^^