Lavandula…lux…camera oscura |
En voilà un titre!???
C’est tout simplement de lavande, de lumière et de chambre dont il est question. Je voulais ainsi rappeler qu’une chambre photographique, en latin, se dit…camera!
Pour cela j’ai décidé de tester 3 objectifs bien différents :
- l’Eurygraphe Berthiot en configuration 180mm à f/6.9
- le E.Krauss Protar en configuration 285mm à f/12.5
- le Schneider Kreuznach Comparon 150mm à f/5.6
Pour ces tests j’ai utilisé ma chambre Globus 13X18, 1 éclairage 3/4 arrière et 1 éclairage (qu’on ne voit pas sur les photos) au dessus du sujet pour adoucir les ombres et donner du modelé. A chaque test, vous pouvez visualiser la configuration et le résultat. J’ai chargé du papier positif Harman dans 3 chassis, puis les ai développés dans du DEKTOL 1+2 à 26°. Les tirages ont été scannés sur EPSON Photo 4490 en 400 DPI et en niveau de gris dans le logiciel Epson, les niveaux on été faits avant le scan et j’ai essayé de me rapprocher au plus près de la gamme de gris et du contraste des originaux.
Vous remarquerez que ces objectifs sont montés sur 3 planchettes différentes : en effet, chacun a son propre pas de vis spécifique, j’ai donc dû fabriquer 2 planchettes différentes pour accueillir le Comparon et le Berthiot puisque le Protar était déjà livré avec la planche.
Pour l’exposition j’ai utilisé ma Lunasix Gossen calibrée sur 1.5 ISO et en lumière incidente.
Let’s go !
Berthiot Eurygraphe
D’après le tableau fourni par Berthiot, la combinaison utilisée ici (390+305mm) est censée donner un 180mm à f/6.9. Ma cellule me donnait 60 secondes à f/16. La prise de vue à 30 secondes est visiblement sous exposée alors que celle à 60 secondes est correcte. Il s’avère donc que l’Eurygraphe n’est pas ouvert à f/6.9 mais plutôt à f/12.1 puisque l’exposition aurait dû être correcte à tout au plus 15 secondes…ou bien mon papier ne fait pas 1.5 ISO mais plutôt moins de 1 ISO?? J’en doute…
D’autre part vu la distance entre la chambre et le sujet, ainsi que le tirage du soufflet, je doute que l’objectif soit en config 180mm comme le montre le tableau. Si on compare cette distance sujet/objectif à celle du Comparon qui est vraiment un grand-angle, alors le Berthiot semblerait plutôt être en config 230/305mm..il faudra que je refasse des tests pour être certain.
J’aime beaucoup le rendu de ce Berthiot dont c’est mon premier test., il n’est pas très contrasté (contrairement aux 2 autres) et le piqué est bien là.
Le bokeh est majestueux et j’ai hâte de le tester en portrait!
Krauss Protar
Même configuration mais cette fois, j’ai dû reculer la chambre au maximum et augmenter le tirage du soufflet jusqu’à la garde pour garder à peu près le même angle de champ. on remarque encore une fois que cet objectif donne des résultats très contrastés, avec moins de nuances que le Berthiot. Mais alors pourquoi le Protar à 60 secondes est sous-exposé alors que l’Eurygraphe pour le même temps d’exposition est correctement exposé? Regardez le tirage du soufflet : il est étiré au maximum. Plus le tirage est grand, moins il y a de lumière qui rentre. Il faut donc compenser cette perte de lumière par cette règle simple : elle consiste à dire que pour chaque allongement du soufflet de 50% par rapport à la longueur focale, on ajoute un diaphragme d’exposition (Source). L’exposition correcte se situe ici à 120 secondes puisqu’il a fallu compenser alors que ma cellule donnait 30 secondes à f/11. Il faut garder à l’esprit que de 60 sec à 120 sec, il n’y a qu’1 valeur de diaphragme (ou de vitesse).
Le piqué sur ce Protar est beaucoup plus élevé mais la profondeur de champ est plus grande que sur l’Eurygraphe. Je n’ai pas testé cet objectif à une ouverture plus petite que f/12.5 mais ça doit faire des ravages question piqué, et surtout en paysage, sujet où il doit exceller.
Il est bien entendu qu’avec de tels temps d’exposition, hors de question de faire un portrait!
Schneider Comparon
Cette fois-ci, et comme on peut le voir, j’ai été obligé de me rapprocher très près du sujet. En effet le 150mm Schneider fournit un angle de champ assez large (équivalent 35-45mm en 24×36 voir ce tableau) puisque la focale « standard » en 13×18 est 210mm (43mm equivalent en 24×36). Comme on peut le constater, cet objectif requiert un tirage assez faible. Il est prévu à l’origine pour agrandir des photos sur un agrandisseur grand format (6×6, 6×7, 6×9) mais comme on peut le voir, cet objectif en configuration « prise de vue » est quand même assez remarquable : c’est un 6 lentilles avec diaphragme rond, et on sent que la qualité Schneider est bien là.
L’exposition correcte se situe à 30 secondes pour f/5.6 alors que la cellule me donnait 8 secondes à f/5.6…mystère…alors soit comme je l’ai dit, le papier DPP fait moins de 1.5 iso (ce qui m’étonnerait) , soit ma cellule fonctionne mal, à part ça je vois pas ce qui explique un tel écart*
* il faut tenir compte de la température de développement : révéler un tirage dans un bain à 26°C n’est pas du tout pareil qu’à 18°C (préconisation Kodak). Il est donc logique d’avoir une image qui monte très rapidement et qui noircit très vite. Le papier baryté a besoin de plusieurs dizaines de secondes, sinon de minutes pour révéler tous les tons de gris. CQFD
Le bokeh est magnifique et le piqué bien présent, mais vous étonnerai-je si je vous dis que le Berthiot et le Protar sont bien meilleurs?
Voilà, à vous de juger, lequel préférez-vous?
Il va sans dire que le scan ne rend pas du tout l’aspect réel d’une photo, car un tirage photo c’est un tout :
- il y a d’abord le « toucher » : manipuler un papier baryté (fibres) entre les mains est un vrai plaisir,
- il y a également la brillance satinée du support,
- et enfin il y a ce rendu « photographique », cette profondeur qui crée de l’émotion et qui fait la différence entre l’argentique et le numérique.
Disclaimer : mes prises de vues, mes conseils et mes expérimentations n’engagent que moi. Ces articles me sont d’abord à titre personnel, d’une grande utilité. Je suis assez scrupuleux sur mes écrits. Je vérifie et cite quand il se doit mes sources…malgré tout il peut subsister quelques erreurs notamment sur la science de l’optique et de la couleur, car rien n’est gravé dans le marbre sauf la physique! Pour conclure, je partage juste mon expérience personnelle, mes impressions et mes expérimentations. Si elles peuvent servir aux lecteurs, j’en serai heureux! J’espère en faire profiter un plus grand nombre en les partageant. |
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