Computar, Navitar, Cosmicar mais où est donc Ornicar? |
Il y a encore quelques années, les objectifs de caméras de surveillance (CCTV en anglais) n’étaient fabriqués que dans cette optique : la vidéo surveillance. C’est la raison pour laquelle la plupart de ces objectifs n’étaient donc pas fabriqués pour avoir la plus grande qualité possible (à quelques exceptions près). Il n’en fallait qu’au centre, là où le capteur recueille la lumière. D’autre part les capteurs CMOS de caméras CCTV n’ont pas une grande résolution et sont relativement petits (1/1.3″). Voir cet excellent article sur Luzphotos. De ce fait, on a pu construire des optiques relativement compactes et très lumineuses! Mais alors que la vente de ces optiques restait confidentielle et dédiée à un marché bien spécifique, tout à coup, avec l’explosion des APN « hybrides mirrorless » dès 2009 (avec l’apparition du Lumix GH1), et grâce à la taille du capteur « Micro Four Thirds » et surtout grâce à la faible distance entre l’objectif et ce capteur (back flange distance) on a pu découvrir une multitude de bagues d’adaptation pour les objectifs de vidéosurveillance en monture C-Mount. Aujourd’hui, le marché est hors de prix même pour des petits « culs de bouteille »….
Il existe plusieurs constructeurs d’objectifs CCTV : Computar, Navitar , Fujinon, Cosmicar (Pentax). D’autres marques re-badgent les Navitar et Computar comme Avenir, Apollo, Tarcus, Elbex, Navitron etc. La majorité des objectifs C-Mount sont également compatibles avec le cinéma 16mm, mais malheureusement incompatibles avec les full-frame et tout ce qui n’est pas hybride à l’exception des mirrorless full-frame SONY A7, sur lesquels quelques optiques CCTV sont exploitables.
Ces objectifs donnent un rendu atypique, presqu’irréel. Leur rendu des couleurs est magnifique pour certains, le piqué phénoménal sur d’autres (surtout au centre).
Je vais ici surtout vous présenter ma série de 3 Computar à ouverture f/1.3 :
- le Computar 25mm f/1.3
- le Computar 50mm f/1.3
- le Navitar/Avenir 75mm f/1.3 (c’est une version identique au Computar 75mm f/1.4)
Mais aussi 2 petits cailloux pas trop mauvais, juste pour le fun :
- le Cosmicar 25mm f/1.8
- et pour finir un Sony 16mm f/1.8
Computar 25mm f/1.3 sur le Panasonic Lumix GH2
Un 25mm monté sur un mirrorless M4/3 comme le GH2 donne au final l’équivalent d’un 50mm f/2.6. En effet le « crop factor » (coefficient multiplicateur de focale ou facteur de recadrage) multiplie la focale et l’ouverture par 2 (même si paradoxalement, il y a autant de lumière qui entre sur le capteur du GH2 que sur un 24×36). Petite explication : nous avons comme référence le capteur 24×36, celui des appareils « full frame ». Si le capteur est plus petit (comme ici celui du GH2 qui fait à peur près moitié la taille du 24×36) alors l’angle de champ est réduit et le 50mm devient un 100mm. L’explication est dans ce schéma.
La plupart des photos sont prises à f/1.3 – f/2.0 ou f/2.8 au maximum. Remarquez le piqué dans la partie centrale qui peut s’avérer phénoménal lorsqu’on est parfaitement au point. Cette netteté s’évanouit vers les bords dans un effet de « swirly bokeh » (flou tournoyant) à f/1.3, ce qui donne un cachet très spécifique à la photo. Les couleurs sont chatoyantes, et l’effet de « flare » est bien contenu grâce au traitement multicouches. J’ai également testé cet objectif sur un Fuji X-E2 dont le capteur a un « crop factor » de x1.5, les images sont encore plus belles, mais le vignetage commence à être largement visible.
Les défauts de cet objectif :
- la distorsion en barillet trop importante…fuyez les fuyantes et évitez les lignes droites!
- le diaphragme à 3 lamelles…mais bon quel intérêt de fermer le diaphragme sur ce genre d’optique?
Une série de photos prises au hameau d’Ennous, à côté de St Affrique-Aveyron (sauf les 2 photos de voitures)
Navitar/Avenir 75mm f/1.3 sur Fuji X-E2
En préambule je peux vous dire d’ores et déjà que ce Navitar 75mm f/1.3 (qui existe également sous la marque Computar en version f/1.4 et sous les marques Avenir, Apollo, Elbex,…) est pour moi aussi bon que ce Noctilux Leica qui vaut la modique somme de $12,000….no comment.
Cet objectif vignette légèrement sur mon Fuji X-E2, et pas du tout sur mon GH1. la qualité à pleine ouverture est phénoménale, la plupart des portraits dans cette galerie sont fait à f/1.3 : il n’y a pas une once d’aberration chromatique, c’est déjà un bon point si on travaille à pleine ouverture.
Le piqué est extraordinaire surtout dans la grande partie centrale. Ceci est normal, ce sont des optiques destinées à des capteurs 1/3″, la partie périphérique des lentilles n’est pas utilisée sur les caméras de surveillance. Associé à mon Fuji X-E2 et le crop factor du capteur X-Trans on obtient un 110mm ouvert à f/1.95, pas mal pour les portraits!!!
N’oubliez pas cependant qu’il n’est utilisable que sur les M4/3 micro four thirds (Lumix, Olympus), le Nikon One, les Fuji à capteur X-trans, et certains « hybrides mirroless » avec plus ou moins de vignetage en fonction du capteur. A tester donc….
Les défauts de cet objectif :
- la mise au point à faible distance est très difficile à faire
- le diaphragme n’a que 6 lamelles, pour la qualité du bokeh on repassera
- la bague de diaphragme est à l’avant, c’est très déroutant et on se trompe souvent
Le Cosmicar 25mm f/1.8 sur le Panasonic Lumix GH1
Ce petit bijou ne paye pas de mine : il est petit, les bagues sont difficiles à attraper mais le résultat est tout à fait particulier. Son rendu est différent, les couleurs semblent « vintage ». Ca vignette pas mal sur les bords mais j’aime bien, c’est un effet naturel qui colle avec le rendu de ce type d’objectif. Au centre c’est bien net à f/1.8 mais l’image se dégrade autour, c’est ce qui donne un peu ce cachet à cet objectif. On en trouve très peu sur le net, mais il n’est pas très cher. On trouve une foultitude de 25mm C-Mount en dessous de f/2.0, ils sont toujours bons quelque soient les marques. Si vous voulez de l’excellence, les meilleurs sont les Tévidon…mais c’est pas le même prix et ils sont plutôt rares. Ici un article qui parle de cet objectif monté sur un GH2.
Les défauts de cet objectif :
- pas de bague de diaphragme
- préhension difficile de la bague de M.A.P
- flou périphérique, distorsion en barillet, vignetage..(mais ça fait le charme de ce petit caillou)
Le SONY 16mm f/1.8 sur le Panasonic Lumix GH1
Ce Sony est le tout premier objectif C-Mount que j’ai acheté pour mon GH1. C’étaient les balbutiements de cette technique, je ne savais pas à l’époque ce que donnerait le rendu d’un tel type d’objectif en photographie numérique. J’ai donc appris qu’en dessous de 25mm de focale point de salut. Et encore…faut-il tomber sur un 25mm qui couvre le capteur M4/3, car cela varie!. Il faut essayer, expérimenter, tâtonner, acheter et vendre. Ce petit caillou ne couvre bien évidemment pas le capteur M4/3 puisque le cercle image est largement inférieur à la diagonale du capteur. J’ai donc travaillé en format carré 1:1, format très intéressant pour sortir des sentiers battus. Dans le cadre de cette série faites à l’Université Paul-Valéry, les sujets sont « encadrés » dans ce format pour être mis en valeur et souligner une géométrie, un graphisme, des couleurs. En outre, ce format impose un cadrage précis, mais tout sujet ne se prête pas à cette contrainte. Mais lorsque le sujet et le cadrage sont bien choisis ce format donne une puissance graphique à la photo.
Cet objectif n’a pas de diaphragme et les caractéristiques optiques sont proches du Cosmicar 25mm f/1.8.
Les défauts de cet objectif :
- pas de bague de diaphragme
- préhension difficile de la bague de M.A.P
- flou périphérique, distorsion en barillet, énorme vignetage
- zone de netteté centrale trop restreinte
Une série de photos prises à l’Université Paul Valéry
Disclaimer : mes prises de vues, mes conseils et mes expérimentations n’engagent que moi. Ces articles me sont d’abord à titre personnel, d’une grande utilité. Je suis assez scrupuleux sur mes écrits. Je vérifie et cite quand il se doit mes sources…malgré tout il peut subsister quelques erreurs notamment sur la science de l’optique et de la couleur, car rien n’est gravé dans le marbre sauf la physique! Pour conclure, je partage juste mon expérience personnelle, mes impressions et mes expérimentations. Si elles peuvent servir aux lecteurs, j’en serai heureux! J’espère en faire profiter un plus grand nombre en les partageant. |
Le Computar est un bijou. Ca commence d’ailleurs à se savoir, on ne le trouve plus trop souvent à un prix raisonnable.
Parmi les 4, je vote incontestablement pour le Computar, bien que certains portraits réalisés avec le Navitar soient magnifiques, avec une graduation des couleurs et une douceur de rendu surprenantes (sans connaître le capteur au dos de l’objectif, j’aurais dit plein format).
Mais les résultats du Computar sont renversants, avec notamment des couleurs à la fois naturelles et rétro. Je suis par ailleurs étonné du piqué et de la zone de netteté que l’on peut obtenir, par exemple, sur l’avant de la voiture. Avec une telle ouverture et une optique à vocation de caméra de surveillance, c’est bluffant.
Ce sont des objectifs qui par ailleurs peuvent transformer certains défauts en qualités, je pense au vignettage qui peut tout-à-fait être attendu, sachant qu’une image parfaite traitée en post-production pour obtenir le même résultat risque de perdre en naturel… même si les logiciels font des miracles.
Reste que la photo sur le vif est très difficile (impossible ?) avec ce type d’objectifs, et qu’il faut, pour les photos posées, un oeil affuté et une vraie maîtrise de la technique photographique.